Nombres complexes (1ère partie)

Dans tout ce chapitre, \(i\) est un nombre imaginaire tel que \({i^2=-1}\) (voir activité La découverte des nombres complexes).

I- Forme algébrique d'un nombre complexe

1) Définition

Définition
On appelle nombre complexe tout nombre \(z\) de la forme \({z=a+ib}\) où \(a\) et \(b\) sont deux nombres réels et \(i\) un nombre imaginaire tel que \({i^2=-1}\).
L'ensemble des nombres complexes est noté \(\mathbb{C}\).

On a donc : \(\mathbb{N}\) \(\mathbb{N}\) est l'ensemble des entiers naturels : \(\mathbb{N}=\left\{0;1;2;3;...\right\}\) \(\subset\) \(\mathbb{Z}\) \(\mathbb{Z}\) est l'ensemble des entiers relatifs (positifs ou négatifs) : \(\mathbb{Z}=\left\{-3;-2;-1;0;1;2;3;...\right\}\). La lettre Z vient du mot allemand «Zahlen» qui signifie « nombres». \(\subset\) \(\mathbb{D}\) \(\mathbb{D}\) est l'ensemble des nombres décimaux. Ce sont les nombres dont l'écriture décimale comporte un nombre de chiffres fini après la virgule, c'est-à-dire les nombres qui peuvent s'écrire sous la forme \(\frac n{10^p}\), où \(n\) est un entier relatif et \(p\) un entier naturel.
Exemples : \(-10,37=\frac{-1037}{10^2}\) ; \(0,0035=\frac{35}{10^4}\)
\(\subset\) \(\mathbb{Q}\) \(\mathbb{Q}\) est l'ensemble des nombres rationnels. Ce sont les nombres qui peuvent s'écrire sous la forme d'un quotient de deux entiers relatifs (Q comme « quotient »). Ce sont les nombres dont les décimales possèdent un motif qui se répète indéfiniment.
Exemples : \(0,5=\frac 1 2\) (c'est aussi un nombre décimal) ; \(\frac{10}3=3,3333...\) (non décimal car il y a une infinité de 3 après la virgule) ; \(\frac{37}{99}=0,373737...\) ; \(\frac 1 7=0,142857\text{ }142857...\)
\(\subset\) \(\mathbb{R}\) \(\mathbb{R}\) est l'ensemble des nombres réels. Ce sont tous les nombres connus jusqu'en classe de Première. Leurs décimales peuvent être quelconques. Les nombres réels qui ne sont pas rationnels sont dits irrationnels.
Exemples de nombres irrationnels : \(\sqrt{2}\) ; \(\pi\)
\(\subset\mathbb C\)
Considérons le nombre complexe \(z=a+ib\) :
Exercice : Déterminer la partie réelle et la partie imaginaire du nombre complexe \(z=-1+2i\).
Solution :
  • La partie réelle de \(z\) est \(-1\) : \(Re(z)=-1\)
  • La partie imaginaire de \(z\) est \(2\) : \(Im(z)=2\)

2) Représentation des nombres complexes

Soit \({(O;\vec u,\vec v)}\) un repère orthonormé direct du plan. A tout point \({M(x;y)}\) du plan, on associe le nombre complexe \({z=x+iy}\).
\(z\) est l'affixe du point \(M\) ou du vecteur \(\overrightarrow{OM}\).
Inversement, tout nombre complexe \({z=x+iy}\) est représenté par le point \({M(x;y)}\) appelé l'image de \(z\).

\(M\) \(z\)
point nombre complexe
image (de \(z\)) affixe (de \(M\))

Le plan muni du repère \({(O;\vec u,\vec v)}\) est appelé plan complexe (de la même manière que les nombres réels peuvent être représentés sur un axe appelé axe réel). Ainsi, chaque point du plan est identifié à un nombre complexe.

Figure 1

On écrit : \({x+iy=z_{M}}{=z_{\overrightarrow{OM}}}\) ou \({M(x+iy)}\). On parlera du point \(M\) d'affixe \(z\) ou du nombre complexe \(z_{M}\) d'image \(M\).

Un nombre complexe de la forme \({x+i0}\), avec \({x \in \mathbb{R}}\), est un nombre réel. Il est représenté par un point de l'axe des abscisses, appelé axe réel.
Un nombre complexe de la forme \({0+iy}\), avec \({y \in \mathbb{R}}\), est dit imaginaire pur . Il est représenté par un point de l'axe des ordonnées, appelé axe imaginaire \(({0=0+0i}\) est à la fois réel et imaginaire pur).

Propriété
Tout nombre complexe \(z\) admet une écriture unique sous la forme \({x+iy}\), avec \({x \in \mathbb{R}}\) et \({y \in \mathbb{R}}\), appelée la forme algébrique de \(z\) .
Deux nombres comples \(z\) et \(z'\) sont égaux si et seulement si ils ont même partie réelle et même partie imaginaire : \({z=z'}{\Leftrightarrow Re(z)=Re(z')}\) et \({Im(z)=Im(z')}\).

II- Opérations dans \(\mathbb{C}\)

Les opérations dans \(\mathbb{R}\) (addition, multiplication, ...) sont étendues à \(\mathbb{C}\) en suivant les mêmes règles, et en ajoutant la règle \({i^2=-1}\).

1) Somme et produit

Définition
Soit \({z=a+ib}\) et \({z'=a'+ib'}\) deux nombres complexes.
La somme de \(z\) et \(z'\) est le nombre complexe \({z+z'=(a+a')+i(b+b')}\).
Le produit de \(z\) et \(z'\) est le nombre complexe \({z.z'=(aa'-bb')+i(ab'+a'b)}\).

Remarque : Les partie réelles et les parties imaginaires s'ajoutent : \({Re(z+z')=Re(z)+Re(z')}\) et \({Im(z+z')=Im(z)+Im(z')}\). En revanche, on n'a pas de règles aussi simples pour la multiplication. Autrement dit, la forme algébrique est bien adaptée à l'addition mais pas à la multiplication. La forme trigonométrique des nombres complexes (qui sera vue dans le second chapitre) est bien adaptée à la multiplication (et à la division) mais pas à l'addition (et à la soustraction).
La formule donnant le produit \(z.z'\) ne doit pas être apprise par cœur, mais il faut savoir la retrouver rapidement en développant \((a+ib)(a'+ib')\).

Exercice : Soit \({z=3+2i}\) et \({z'=2-i}\). Calculer \({z+z'}\) et \({z\times z'}\).
Solution :
  • \({z+z'=(3+2i)+(2-i)}{=(3+2)+(2-1)i}{=5+i}\)
  • \({z\times z'=(3+2i)\times(2-i)}{=6-3i+4i-2i^2}{=6-3i+4i-2(-1)}{=8+i}\)

Les identités remarquables restent valables dans \(\mathbb{C}\), mais on a aussi : \({a^2+b^2=(a+ib)(a-ib)}\) pour tous réels \(a\) et \(b\). Ainsi, \(a^2+b^2\) peut se factoriser dans \(\mathbb{C}\) mais pas dans \(\mathbb{R}\).

Exercice : Soit \({z=1+2i}\). Calculer \(z^2\).
Solution :
\({z^2=(1+2i)^2}{=1^2+2\times 2i+(2i)^2}{=1+4i-4}{=-3+4i}\)
Exercice : Résoudre dans \(\mathbb{C}\) l'équation \({z^2=-9}\).
Solution :
Les équations suivantes sont équivalentes : \({z^2=-9}\)
\({z^2-(-9)=0}\)
\({z^2-(3i)^2=0}\)
\({(z-3i)(z+3i)=0}\)
\({z-3i=0}\) ou \({z+3i=0}\)
\({z=3i}\) ou \({z=-3i}\)
L'équation a donc deux solutions dans \(\mathbb{C}\) : \(3i\) et \(-3i\). Elle n'en a aucune dans \(\mathbb{R}\).

2) Inverse et quotient

Tout nombre complexe \(z\) non nul a un inverse dans \(\mathbb{C}\) et on a, si \({z=a+ib}\):
\({\frac{1}{z}=\frac{1}{a+ib}}{=\frac{1}{a+ib}\times \frac{a-ib}{a-ib}}{=\frac{a-ib}{a^2+b^2}}\). On a multiplié et divisé par \({a-ib}\), qui est le conjugué de \({a+ib}\).

Exercice : Ecrire sous forme algébrique les nombres complexes \({z=\frac{1}{3+4i}}\) et \({z'=\frac{2+5i}{3-i}}\).
Solution :
  • \({z=\frac{1}{3+4i}}{=\frac{1}{3+4i}\times\frac{3-4i}{3-4i}}{=\frac{3-4i}{3^2-(4i)^2}}{=\frac{3-4i}{9+16}}{=\frac{3}{25}-\frac{4}{25}i}\)
  • \({z'=\frac{2+5i}{3-i}}{=\frac{2+5i}{3-i}\times\frac{3+i}{3+i}}{=\frac{(2+5i)(3+i)}{3^2-i^2}}{=\frac{6+15i+2i-5}{9+1}}{=\frac{1+17i}{10}}{=0,1+1,7i}\)

III- Conjugué d'un nombre complexe

Définition
Pour tout nombre complexe \({z=x+iy}\), le conjugué de \(z\), noté \(\overline{z}\), est le nombre complexe \({x-iy}\) :     \({\overline{z}=x-iy}\)
\({M'(\overline{z})}\) est le symétrique de \({M(z)}\) par rapport à l'axe des abscisses.
Figure 2
Exercice : Déterminer le conjugué des nombres suivants : \({7-4i}\);  i et \(-5\).
Solution :
  • \(\overline{7-4i}=7+4i\)
  • \(\overline{i}=-i\)
  • \(\overline{-5}=-5\)
Exercice : Résoudre dans \(\mathbb{C}\) l'équation \({(2+i)z-2\overline{z}=1}\).
Solution :
On pose \(z=a+ib\).
Les équations suivantes sont équivalentes :
\((2+i)z-2\overline{z}=1\)
\((2+i)(a+ib)-2(a-ib)=1\)
\(2a+2ib+ia+i^{2}b-2a+2ib=1\)
\(-b+i(a+4b)=1\)
En identifiant les parties réelles et imaginaires des deux membres, on obtient :
\(\begin{equation*} \left\{ \begin{aligned} -b&=1&\\ a+4b&=0&\\ \end{aligned} \right. \end{equation*}\) qui équivaut à \(\begin{equation*} \left\{ \begin{aligned} b&=-1&\\ a&=4&\\ \end{aligned} \right. \end{equation*}\)
L'équation a donc une solution unique : \({4-i}\).
Remarque : Pour tout nombre complexe \(z\) :
Propriété
Conjugué et opérations
Pour tous nombres complexes \(z\) et \(z'\) et pour tout entier relatif \(n\), on a :

Démonstration :

Exercice : Donner une expression du conjugué du nombre complexe \(\frac{i\left(1+2i\right)^5}{3-7i}\). L'expression obtenue doit s'écrire sans barre de conjugué.
Solution :
\(\overline{\left(\frac{i\left(1+2i\right)^5}{3-7i}\right)}=\frac{\overline{i\left(1+2i\right)^5}}{\overline{3-7i}}\) \(=\frac{\overline{i}\overline{\left(1+2i\right)^5}}{3+7i}\) \(=\frac{-i\times{\overline{1+2i}^5}}{3+7i}\) \(=\frac{-i(1-2i)^5}{3+7i}\)

IV- Equations du second degré à coefficients réels

On veut résoudre dans \(\mathbb{C}\) l'équation \(az^2+bz+c=0\) (avec \(a,b,c\in \mathbb{R}\) et \(a\ne 0\)).

On écrit le trinôme sous forme canonique : \({az^2+bz+c=a\left(z^2+\frac{b}{a}z+\frac{c}{a}\right)} \) \({=a\left[z^2+2\frac{b}{2a}z+\left(\frac{b}{2a}\right)^2-\left(\frac{b}{2a}\right)^2+\frac{c}{a}\right]}\) \({=a\left[\left(z+\frac{b}{2a}\right)^2-\frac{b^2-4ac}{4a^2}\right]}\) \({=a\left[\left(z+\frac{b}{2a}\right)^2-\frac{\Delta}{4a^2}\right]}\) en posant \({\Delta=b^2-4ac}\) (\(\Delta\in\mathbb{R}\)).

1er cas : \(\Delta>0\) Alors \(\frac{\Delta}{4a^2}=\left(\frac{\sqrt{\Delta}}{2a}\right)^2\).
\(az^2+bz+c=0\) \({\Leftrightarrow a\left[\left(z+\frac{b}{2a}\right)^2-\left(\frac{\sqrt{\Delta}}{2a}\right)^2\right]=0}\) \({\Leftrightarrow\left(z+\frac{b}{2a}-\frac{\sqrt{\Delta}}{2a}\right)\left(z+\frac{b}{2a}+\frac{\sqrt{\Delta}}{2a}\right)=0}\) \({\Leftrightarrow z=\frac{-b+\sqrt{\Delta}}{2a}}\) ou \({z=\frac{-b-\sqrt{\Delta}}{2a}}\)

L'équation \(az^2+bz+c=0\) a deux solutions réelles : \({z_{1}=\frac{-b+\sqrt{\Delta}}{2a}}\) et \({z_{2}=\frac{-b-\sqrt{\Delta}}{2a}}\).

2ème cas : \(\Delta=0\)
\(az^2+bz+c=0\) \({\Leftrightarrow a\left(z+\frac{b}{2a}\right)^2=0}\) \({\Leftrightarrow z+\frac{b}{2a}=0}\) \({\Leftrightarrow z=-\frac{b}{2a}}\).

L'équation \(az^2+bz+c=0\) a une solution réelle (double) : \({z_{0}=\frac{-b}{2a}}\).

3ème cas : \(\Delta\lt 0\) Alors \(\frac{\Delta}{4a^2}=\left(\frac{i\sqrt{-\Delta}}{2a}\right)^2\).
\(az^2+bz+c=0\) \({\Leftrightarrow a\left[\left(z+\frac{b}{2a}\right)^2-\left(\frac{i\sqrt{-\Delta}}{2a}\right)^2\right]=0}\) \({\Leftrightarrow\left(z+\frac{b}{2a}-\frac{i\sqrt{-\Delta}}{2a}\right)\left(z+\frac{b}{2a}+\frac{i\sqrt{-\Delta}}{2a}\right)=0}\) \({\Leftrightarrow z=\frac{-b+i\sqrt{-\Delta}}{2a}}\) ou \({z=\frac{-b-i\sqrt{-\Delta}}{2a}}\)

L'équation \(az^2+bz+c=0\) a deux solutions complexes conjuguées : \({z_{1}=\frac{-b+i\sqrt{-\Delta}}{2a}}\) et \({z_{2}=\frac{-b-i\sqrt{-\Delta}}{2a}}\).

Dans tous les cas, le trinôme se factorise : \({az^2+bz+c=a\left(z-z_{1}\right)\left(z-z_{2}\right)}\), avec \(z_{1}\) et \(z_{2}\) réels, ou complexes conjugués (éventuellement égaux).

Exercice : Résoudre dans \(\mathbb{C}\) l'équation \({z^2-8z+25=0}\).
Solution :
\(a=1\), \(b=-8\), \(c=25\).   \(\Delta=b^2-4ac=64-4\times1\times25=-36\)
\(\Delta\lt 0\) donc l'équation a deux solutions complexes conjuguées : \({z_{1}=\frac{-b+i\sqrt{-\Delta}}{2a}} {=\frac{8+6i}{2}}{=4+3i}\) et \({z_{2}=\frac{-b-i\sqrt{-\Delta}}{2a}} {=\frac{8-6i}{2}}{=4-3i}\).
Remarque : L'équation n'a pas de solution dans \(\mathbb{R}\). Le polynôme \({z^2-8z+25}\) ne se factorise pas dans \(\mathbb{R}\). En revanche dans \(\mathbb{C}\), on a : \({z^2-8z+25=\left(z-4-3i\right)\left(z-4+3i\right)}\).

V- Nombres complexes et géométrie

1) Interprétation géométrique de l'addition des nombres complexes et de la multiplication d'un nombre complexe par un nombre réel

Soit \(M\) et \(M'\) les points d'affixe \(z\) et \(z'\). Soit \(k\) un nombre réel.
La somme \(z+z'\) a pour image le point \(S\) tel que \(\overrightarrow{OS}=\overrightarrow{OM}+\overrightarrow{OM'}\).
Autrement dit, \(OMSM'\) est un parallélogramme.
Le produit \(kz\) a pour image le point \(P\) tel que \(\overrightarrow{OP}=k\overrightarrow{OM}\).
En particulier, \(-z\) a pour image le symétrique \(P'\) de \(P\) par rapport à l'origine \(O\).













Remarque : L'interprétation géométrique de la multiplication de deux nombres complexes, plus difficile, sera vue dans le second chapitre sur les nombres complexes.

2) Affixe d'un vecteur et affixe du milieu d'un segment

Propriété
Soit \(A\) et \(B\) deux points du plan, d'affixes \(z_A\) et \(z_B\).

Démonstration :

Exercice : Dans le plan complexe, on donne les points \(A(-1;3)\), \(B(4;5)\), \(C(0;-2)\) et \(D(5;0)\).
Démontrer que \(ABDC\) est un parallélogramme par deux méthodes différentes utilisant toutes deux les nombres complexes.
Solution :
1ère méthode : On démontre que les vecteurs \(\overrightarrow{AB}\) et \(\overrightarrow{CD}\) sont égaux.
\(z_{\overrightarrow{AB}}=z_B-z_A=(4+5i)-(-1+3i)=5+2i\)
\(z_{\overrightarrow{CD}}=z_D-z_C=5-(-2i)=5+2i\)
Ainsi, \(z_{\overrightarrow{AB}}=z_{\overrightarrow{CD}}\) donc \(\overrightarrow{AB}=\overrightarrow{CD}\). On en déduit que \(ABDC\) est un parallélogramme.
2ème méthode : On démontre que les diagonales \([AD]\) et \([BC]\) ont le même milieu.
Soit \(I\) le milieu de \([AD]\) : \(z_I=\frac{z_A+z_D}2=\frac{-1+3i+5}2=2+\frac32i\)
Soit \(J\) le milieu de \([BC]\) : \(z_J=\frac{z_B+z_C}2=\frac{4+5i-2i}2=2+\frac32i\)
Ainsi, \(z_I=z_J\), donc \(I=J\). On en déduit que \(ABDC\) est un parallélogramme.
Fin du premier chapitre sur les nombres complexes
Lien vers le second chapitre